Intervenants:
- Jean-Christophe Demarta, Senior Vice President Global Advertising at The NY Times / vice président de la publicité internationale au New York Times
- Sarah Herz, Editorial head at Figaro Medias / directrice éditoriale au Figaro Médias
- Moderator : Frédéric Filloux, Associate Professor at Sciences Po Journalism School / professeur associé à l’Ecole de journalisme de Sciences Po
Frédéric Filloux commence par mettre en question le choix de Sarah Herz de rejoindre prochainement Condé-Nast, en mettant en avant des chiffres de diffusion peu encourageants en France : Vogue enregistre 5% en perte de diffusion, et Vanity Fair 16%.
« Brand content » et « marque-média »
Pour Sarah Herz, « la diffusion n’est pas le reflet de la bonne santé d’une marque média aujourd’hui. C’est le reflet d’un monde qui change, la diffusion baisse mais la communauté Vogue a longtemps été la plus grosse communauté média en France ».
Frédéric Filloux enchaîne immédiatement avec le sujet du « brand-content ». Il demande à Sarah Herz sa définition : « Ma définition, c’est du bon contenu, intéressant pour les lecteurs, qui engage et crée des émotions. Il s’inscrit dans la lignée de la marque-média ». Pour Sarah Herz, les marques-médias ont des enjeux assez proches des enjeux des marques aujourd’hui : se développer et se diversifier.
Sarah Herz explique qu’à ce jour, elle a autorité sur les journalistes du « digital » qui font du contenu classique : « Chaque groupe de presse a ses règles. Au Figaro, les journalistes salariés n’ont pas le droit de créer du contenu pour les marques, même si on sait très bien qu’il est difficile de froisser des contributeurs. On a souvent des appels téléphoniques de marques qui ne sont pas contentes de ce qui a été publié ».
Un débat « peu intéressant » ?
Frédéric Filloux, qui précise qu’il « n’est pas procureur », ajoute qu’il y a quand même « une porosité absolue entre la rédaction classique et la rédaction qui écrit pour les marques ». Sarah Herz le coupe. Pour elle, ce débat est « peu intéressant ». D’après la directrice éditoriale au Figaro Médias, « il nous est souvent arrivé au Figaro d’avoir des pages anti-Google et d’avoir aussi des pages financées par Google ».
La discussion s’est ensuite orientée vers le secteur du brand content au New-York Times. Jean-Christophe Demarta précise: 150 personnes s’occupent du brand-content et du service marketing. On n’avait personne ou très peu de monde il y a encore cinq ans. On a fait venir toutes les compétences. On fait du journalisme, simplement pour le bien de marques. »
Côté chiffres, cela représente 550 millions en recettes publicitaires. Soit 1/3 du chiffre d’affaires. Il y a 10 ans, les contenues publicitaires représentaient 70%! Sarah Herz observe que » les marques ont des besoins de plus en plus différents. Avant, on prenait une agence et on faisait une campagne de pub statutaire, même pour tous les pays. Aujourd’hui, il y a un besoin d’adaptation ».
Jean-Christophe Demarta en est persuadé, la publicité va jouer un rôle de moins en moins important, où la data client va être de moins en moins exploitée.
Frédéric Filoux apporte une dernière observation : « On a l’impression qu’il y a un début de prise en compte de la qualité éditoriale. Est-ce que l’écosystème de la publicité est prêt pour cette prise en compte de la qualité éditoriale ? ». Une question à laquelle Jean-Christophe Demarta répond par la positive : « Je pense qu’il est prêt ».
Crédits photo : Jules Boudier